L’imagerie médicale : l’arme invisible contre une maladie silencieuse
Dr BOUMEHDI Bounhir, médecin radiologue / Salé
Une chute banale, une image révélatrice
Il voulait simplement accomplir son ablution avant la prière du Maghreb.
Un sol mouillé, un faux pas, et soudain le bruit sec d’un os qui cède : fracture du col du fémur.
À l’hôpital, le diagnostic tombe après les premiers clichés radiographiques : ostéoporose avancée, jamais dépistée.
Cette scène, tristement fréquente, illustre la nécessité de l’imagerie médicale dans la détection de cette maladie osseuse silencieuse.
Car c’est souvent l’image qui parle avant la douleur.
Une pathologie silencieuse mais visible… à travers l’imag radiologique
L’ostéoporose, longtemps perçue comme une fatalité du grand âge, est aujourd’hui une maladie mesurable, quantifiable, objectivable grâce à la radiologie moderne.
Chaque année, des milliers de Marocains – surtout des femmes après la ménopause – découvrent leur fragilité osseuse trop tard, après une fracture.
Pourtant, les outils existent.
Radiographie standard, densitométrie osseuse (DXA), scanners quantitatifs et même imagerie à comptage de photons offrent aujourd’hui une vision fine de la santé du squelette.
Ils permettent de dépister précocement la perte osseuse, souvent avant même l’apparition des premiers symptômes.
Selon la Société Marocaine de Rhumatologie, près d’une femme sur trois après 50 ans souffre d’ostéoporose.
Un diagnostic posé à temps par l’imagerie peut prévenir la fracture, préserver la mobilité et sauver la vie.
L’imagerie médicale, pilier du dépistage précoce
L’examen de référence reste la densitométrie osseuse (DXA) — rapide, indolore et d’une précision remarquable.
Elle mesure la densité minérale des os, notamment au niveau du rachis et de la hanche, zones les plus exposées aux fractures.
« La DXA est à l’os ce que la mammographie est au sein : un outil de prévention incontournable »,
souligne le Dr BOUMEHDI Bounhir.
Au Maroc, une trentaine d’appareils DXA sont recensés, concentrés principalement à Rabat, Casablanca, Marrakech et Fès.
Les rhumatologues et les radiologues plaident pour une accessibilité accrue à cet examen, qui devrait devenir aussi courant qu’un électrocardiogramme ou une analyse de glycémie.
L’imagerie permet également le suivi dans le temps :
les examens répétés à intervalles réguliers évaluent l’efficacité des traitements et orientent les ajustements thérapeutiques.
L’œil du radiologue : un allié du rhumatologue
La radiologie ne se limite plus à constater la fracture.
Elle devient un instrument de prévention, d’évaluation et d’accompagnement thérapeutique.
Les radiologues marocains participent de plus en plus aux campagnes de dépistage communautaire, notamment dans les régions rurales.
Les nouveaux outils d’imagerie, comme les scanners à faible dose ou les logiciels d’analyse osseuse intégrés aux mammographes, ouvrent la voie à un dépistage simultané chez les femmes de plus de 50 ans.
Ainsi, un examen de routine peut désormais sauver bien plus qu’un os : il peut préserver une vie entière d’autonomie.
Quand la technologie rejoint la santé publique
Le Maroc vieillit.
Avec une espérance de vie moyenne de 77 ans et une population de seniors en forte croissance, le risque de fractures ostéoporotiques est appelé à tripler d’ici 2050.
Face à ce défi, l’imagerie médicale est un investissement stratégique.
Elle ne se limite pas à la détection : elle permet aussi la sensibilisation, en montrant aux patients l’état réel de leur squelette.
Une image bien expliquée vaut parfois plus qu’un long discours médical : elle convainc, motive et éduque.
Prévenir par l’image, soigner par la science
L’ostéoporose peut être freinée, voire stabilisée, grâce à des traitements efficaces : bisphosphonates, dénosumab, suppléments de vitamine D et calcium.
Mais ces traitements n’ont de sens qu’après un diagnostic précis, fondé sur l’imagerie.
Les médecins rappellent que la première étape de la prévention est simple :
une DXA à partir de 65 ans chez la femme et de 70 ans chez l’homme,
et plus tôt encore en cas de facteurs de risque (ménopause précoce, corticothérapie prolongée, antécédents familiaux).
Entre foi, mouvement et équilibre
Dans une société où la spiritualité accompagne les gestes du quotidien, l’imagerie devient aussi un miroir de la santé intérieure.
La prière, avec ses mouvements répétitifs et équilibrés, est à la fois un acte de foi et un test fonctionnel.
Quand se prosterner devient difficile, c’est peut-être le moment… de consulter, et de réaliser une densitométrie.
Un message d’espoir et de science
En cette Journée mondiale de l’ostéoporose, Dr BOUMEHDI Bounhir rappelle que voir, c’est déjà prévenir.
Une fracture évitée, c’est une prière accomplie debout, une indépendance préservée et une dignité sauvegardée.
L’imagerie médicale, loin d’être un luxe, est une lumière sur la solidité de nos os et la fragilité de nos habitudes.
Apprenons à l’utiliser non pas quand il est trop tard, mais tant que nous pouvons encore marcher, bouger et vivre pleinement.

