On maîtrise mieux les fonctionnalités de l’Intelligence Artificielle (IA) grâce à l’imagerie par résonance magnétique anatomique (IRMa) et par L’Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle ( IRMf) du cerveau.
Ceci est d’autant plus vrai que l'explosion de l’IA en radiologie est en partie liée à sa promesse d’améliorer la fiabilité du diagnostic en réduisant l’erreur humaine. Ces progrès technologiques ne pourront pas remplacer la relation entre le patient et le médecin, ni ses responsabilités éthiques et juridiques. L’IA pourrait être une opportunité pour ré-humaniser la radiologie.
Qu’en est il de l’imagerie médicale, particulièrement l’imagerie par résonance magnétique dans le domaine de la recherche scientifique liée à l’intelligence artificielle ?
Il faut rappeler que Les neurosciences ont permis d’estimer que le cerveau humain est doté d’environ 86 milliards de neurones, et d’un million de milliards de connexions dont une bonne partie s’établit et se sélectionne au cours du développement de l’intelligence chez l’enfant.
En informatique et intelligence artificielle (IA), ce que l’on appelle aujourd’hui, le neuromorphisme, qui sont des puces électroniques qui imitent le fonctionnement de notre cerveau), à des champs d’action bien limités.
Le neuromorphisme a pour ambition de simuler la « logique » de notre système cérébral.
Par exemple, le cerveau numérique de l’entreprise américaine « Intel », réputé l’un des plus puissants au monde, ne comporte que 100 millions de neurones, soit le cerveau d’un petit mammifère, entre un hamster et un rat.
Ainsi, à ce jour, le cerveau humain reste, de très loin, le meilleur siège de l’intelligence sur Terre. Encore faut-il bien l’éduquer et bien l’utiliser.
Le « Must « de l’Intelligence Artificielle (IA)
L’apprentissage profond, multi-couche, le « must » de l’IA contemporaine dont on se targue partout, est en fait une technique particulière d’apprentissage automatique (machine learning en anglais) qui s’inspire directement de l’architecture du cortex visuel, l’occipital.
A ce niveau du cerveau, différentes couches de neurones successives extraient et analysent les caractéristiques d’une scène.
Il faut préciser que le cortex visuel occupe le lobe occipital du cerveau et est chargé de traiter les informations visuelles.
Les systèmes de reconnaissance de visage en IA s’appuient ainsi sur des réseaux de neurones artificiels comprenant eux aussi plusieurs couches « cachées » dédiées à différents niveaux d’analyse de l’image: contours, éléments faciaux et visage.
Grâce à un algorithme dit de « rétropropagation de l’erreur » pour se corriger en s’ajustant, à partir de dizaines de milliers d’essais, les processeurs du système apprennent et finissent par réussir à reconnaître les visages.
Yann Le Cun, fondateur de cette nouvelle IA et prix Turing 2019, considéré comme le prix Nobel de l’IA, est le scientifique en chef chez Facebook ( littéralement, le « Livre des visages »), est spécialiste en la vision artificielle, qui est derrière tous ces progrès.
Certes, le cortex visuel est déjà complexe, mais n’a rien à voir avec la richesse de l’intelligence du cerveau humain tel qu’il se développe chez l’enfant.
Le cerveau de l’enfant se distribue en six lobes : occipital pour la vision, temporal pour l’audition, la mémoire et le langage, pariétal pour la coordination spatiale et les maths, frontal pour la logique, la prise de décision et notamment le contrôle inhibiteur.
Vers le centre du cerveau, les lobes insulaire et limbique pour la conscience de soi et les émotions.
L’IA d’aujourd’hui n’imite en fait qu’un seul lobe, le premier, l’occipital !
Comme le révèle, depuis quelques années, la mesure de la matière grise chez l’enfant grâce à l’imagerie par résonance magnétique anatomique (IRMa), les cortex sensomoteurs, tel le cortex visuel, maturent précocement.
Chez le bébé ( déjà pour la reconnaissance des visages), alors que le cortex préfrontal, en revanche, continue sa maturation tardivement, se déployant jusqu’à la fin de l’adolescence.
C’est lui, le cortex préfrontal, qui est intimement lié à l’intelligence humaine telle que mesurée par des tes tests classiques de quotient intellectuel (QI) ou de raisonnement logique et des tests plus récents de fonctions exécutives.
L’effet de ces tests sur le cerveau peuvent être visualisés grâce à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), telles l’inhibition des automatismes moteurs et cognitifs trop rapides, la flexibilité cognitive ou aptitude à changer de stratégie et la mémoire de travail ( celle des éléments utiles pour résoudre un problème).
Plus de 86 milliards de neurones se combinent dans les six lobes, sur deux hémisphères, créant un million de milliards de connexions.
Il y a ainsi potentiellement un réseau bien plus complexe qu’Internet a l’intérieur même de chaque tête humaine.
Face à cette immense complexité biologique, façonnée au cours de l’évolution, apprendre, c’est éliminer. D’où le rôle clé de l’inhibition à tous les niveaux du cerveau, du physiologique au cognitif.
En supprimant ou en renforçant certains contacts entre neurones ( les synapses) s’opère, en interaction avec l’environnement social et culturel, une forme d’élagage ou de « darwinisme neuronal » au cours du développement de l’enfant.
C’est cette subtile sélection, le choix du bon réseau au bon moment, qui fonde notre intelligence qui est une forme optimale de l’adaptation biologique.
Enfin, il faut toujours préciser que les ordinateurs n’ont corps ni cerveau et, par conséquent dirait le neurologue américain Antonio Damasio, ils sont sans émotions ni sentiments réels, sans enjeux de survie ou « homéostasie », sans peur de se tromper.
Et ce qui est plus grave d’un point de vue moral, comme dans le domaine militaire: sans aversion de faire souffrir autrui et sans inhibiteurs de violence !
Certes, l’intelligence artificielle est et sera d’un apport indéniable, mais la main, l’œil, le cœur et le cerveau du médecin radiologue, seront toujours de la partie.
Dr Bounhir BOUMEHDI
Médecin radiologue