Ces critères ont été développés pour les protocoles d’essais thérapeutiques, pour pouvoir comparer l’efficacité de différentes drogues entre elles. Cependant, ils peuvent être utiles pour le praticien au quotidien, car ils fournissent une trame de lecture des examens et de rédaction de comptes-rendus, impliquant la mesure des mêmes lésions sur les examens successifs, et une conclusion globale, afin d’améliorer la lisibilité pour les cliniciens. Des critères reproductibles, objectifs et quantitatifs sont nécessaires pour définir un langage commun entre les radiologues et les cliniciens, afin que ces derniers puissent prendre une décision thérapeutique éclairée. Au Maroc, cela pourrait être un excellent terrain d’échanges scientifiques entre les départements de cancérologie et de radiologie des facultés de médecine publique et privées, les sociétés Marocaines de cancérologie et de radiologie, les industriels du médicament et de l’imagerie médicale.
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En cancérologie, les décisions thérapeutiques dépendent des évaluations radiologiques
Par Dr Bounhir BOUMEHDI
Médecin Radiologue
Les méthodes d’évaluation de la réponse aux traitements anticancéreux, notamment par l'imagerie médicale, ont été développés entre 2000 et 2009 et viennent d'être actualisés en 2017.
Par ailleurs, toute évaluation objective de la réponse des tumeurs malignes aux traitements anticancéreux est obtenue grâce à l’imagerie médicale. Le médecin traitant base sa décision de poursuivre ou d’arrêter un traitement essentiellement sur l’évolution des tumeurs en imagerie. Par ailleurs, dans les essais cliniques, c’est à partir de l’évaluation en imagerie qu’est déterminée l’efficacité des traitements, avant leur mise sur le marché par les autorités compétentes. C’est dans ce contexte que la communauté des radiologues, au niveau international, a mis au point des critères standardisés en imagerie d’évaluation des traitements en oncologie. Il est donc du devoir du médecin radiologue de s’assurer que les techniques d’imagerie soient fiables et évoluant en fonction des avancées de la biomédecine et de la biotechnologie. Les radiologues sont également dans l’obligation de bénéficier de sessions de formation continue, pour interpréter les images radiologiques en fonction de traitement par de nouvelles molécules. Beaucoup de décisions thérapeutiques dépendront des évaluations radiologiques.
Disponibilité de standards internationaux
La plupart des méthodes d’évaluation des traitements sont basées sur la mesure de la taille des lésions. Les critères RECIST (Response Evaluation Criteria in Solid Tumors), développés en 2000 et révisés en 2009, sont devenus les critères les plus largement utilisés pour l’évaluation de la réponse dans les essais cliniques dans les tumeurs solides. Les derniers critères concernant l’immunothérapie ont été publié en 2017.
Pour les lymphomes, ce sont les critères de l’IWG (International Working Group), dits critères de Cheson, qui sont utilisés pour évaluer l’efficacité thérapeutique. Ils sont basés sur la mesure bi-dimensionnelle (le plus grand axe et sa plus grande perpendiculaire) des lésions, et prennent en compte le métabolisme tumoral en intégrant la tomographie par émission de positons (TEP).
D’autres critères ont été développés en fonction des besoins, mais sont moins systématiquement utilisés. Les critères de Choi, dans les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) sous chimiothérapie ciblée prennent en compte à la fois les changements de taille et la nécrose mesurée par la densité en scanner. Les critères mRECIST sont utilisés dans les carcinomes hépatocellulaires traités par chimio-embolisation, et ne mesurent que la portion viable hypervasculaire des lésions.
Enfin, derniers arrivés, les critères iRECIST pour évaluer les immunothérapies ont été développés par le groupe RECIST et publiés en mars 2017. Cette nouvelle classe thérapeutique a démontré leur efficacité dans les mélanomes et les cancers du poumon. De nombreux essais cliniques sont en cours dans d’autres cancers. Cependant, ces traitements posent de nouveaux problèmes d’évaluation de la réponse au traitement car 10% environ des patients ont une réaction initiale immunitaire majeure, entraînant une augmentation massive de la taille des lésions, pouvant être prise à tort pour une progression, alors que ces patients répondront ensuite au traitement.
Pour un développement professionnel continu en radiologie
La communauté radiologique, en concertation avec les médecins oncologues, doivent mettre en place un programme commun, afin d’harmoniser la prise en charge. Il est indispensable pour l’ensemble des radiologues de maîtriser ces outils, car les patients atteints de maladies cancéreuses, qui sont sous traitement, sont en constance augmentation, aussi bien dans le secteur médical libéral , universitaire, publique et militaire.
Il faut s’inspirer éventuellement de l’expérience française en matière de formation de DPC (Développement Professionnel Continu), qui a été mise ne place depuis 2013 afin de former les radiologues à l’utilisation de ces différents critères d’évaluation de la réponse tumorale. Dans le cadre de l’initiative de FORCE imaging, qui vise à structurer l’imagerie dans la recherche clinique, un atelier « Hands on » a été organisé au premier trimestre 2018 afin qui a proposé une formation pratique centrée sur des cas cliniques. Des initiatives similaires sont en cours au niveau européen, en lien avec l’ESOI (European Society of Oncologic Imaging) et l’EORTC (European Organisation for Research and Treatment of Cancer). Pour quand le tour des radiologues marocains.